Burkina Faso - Récupération de terres dégradées dans le Sahel burkinabé et valorisation des sols restaurés par des crédits carbone

Développement des herbacées après trois saisons de pluies

Comme pour l’ensemble des pays du Sahel, le Burkina Faso subit une forte dégradation des terres suite à des sécheresses successives et des activités anthropiques. Les terres dégradées sont caractérisées par une forte destruction du couvert végétal et une dénudation excessive du sol qui devient très vulnérable à l’érosion. Il en découle une forte baisse de la productivité des terres. La dégradation des sols est en progression et menace l’approvisionnement alimentaire des populations et contribue également aux changements climatiques. Un tiers du territoire burkinabé est touché par ce phénomène qui se concentre essentiellement dans la partie nord du pays.

Dans un souci de participer à la lutte contre ce phénomène, le projet BKF/017 a concentré ses activités de gestion des ressources naturelles sur des travaux de récupération de terres dégradées à vocation sylvo-pastorales dans la région du Sahel.

Les travaux ont été réalisés en sous-traitance avec deux organisations non gouvernementales (ONG) locales spécialisées dans le domaine. 8.500 hectares de terres dégradées ont été restaurées dans sept communes, par une méthode mécanisée connue sous le nom de "Valerani" (tracteur + charrue spécialisée). Il s’agit d’une méthode rapide, efficiente et adaptée aux grandes surfaces sahéliennes. L’approche consiste à labourer mécaniquement des terres dégradées. La charrue creuse des micro-bassins aptes à recueillir les eaux de pluies et de ruissellement et d’assurer le développement d’espèces herbacées et ligneuses. La technologie nécessite des actions en amont et en aval pour assurer une pérennisation.

En amont des travaux mécaniques, il s’agit d’identifier soigneusement les sites à récupérer en concertation avec les municipalités, les services techniques déconcentrés et les bénéficiaires (analyse du statut foncier, des conflits latents, du type de sol, etc.). Pendant les travaux, les populations sont sensibilisées aux techniques de semis d’espèces herbacées et ligneuses. Les femmes sont fortement impliquées dans le choix des semences et l’ensemencement des sites récupérés notamment pour assurer la production des espèces comestibles utilisées dans l’alimentation familiale et les espèces utilitaires (vannerie, pharmacopée).

En aval des travaux, le souci principal consiste à mettre en place une gestion durable des sites restaurés. Dans ce cadre, le projet a appuyé d’une part l’élaboration de chartes foncières communales. La charte foncière est un outil d’une loi récente sur le régime foncier rural qui a comme but de concilier le droit coutumier avec le droit de l’état. Ces chartes, élaborées d’une façon participative, déterminent les règles de gestion durables des terres restaurées. Elles ont été élaborées pour le compte des sept municipalités concernées par les actions de restauration des terres dégradées. D'autre part, la création et le renforcement des capacités des instances foncières villageoises ont été réalisés. Ces instances sont les démembrements du service foncier communal en charge de faire appliquer les chartes foncières.

Suite à leur creation récente, l'application des chartes foncières est encore timide. Néanmoins, elle a déjà pu participer à la réduction du nombre de conflits fonciers. Pour permettre la valorisation, à l’aide de crédits carbone, des activités de boisement sur ces sites restaurés, le projet BKF017 a entrepris l’élaboration de deux projets carbone avec le Plan Vivo comme standard. La Fondation Plan Vivo vise à garantir les moyens de subsistances des populations impliquées dans leurs projets, d’améliorer les écosystèmes et de protéger la biodiversité. 

Les deux ONG qui ont réalisé les travaux de récupération des terres dégradées, ont chacune la charge de la coordination d’un projet Plan Vivo. Suite à l’enregistrement des deux projets auprès de la Fondation, les premiers certificats annuels de crédit carbone ont été délivrés. C’est la première fois qu’au Sahel, un projet de boisement génère des crédits carbone.

Le processus de vente de ces certificats a été appuyé et dans ce cadre l’agence LuxDev s’est engagée à acquérir des crédits de compensation.

Des contrats de paiement pour services écosystémiques signés entre les ONG et les villages bénéficiaires, assureront aux populations, pour les trois décennies à venir, une retombée de 60% des recettes de vente des crédits carbone sur le marché volontaire. Ces ressources précieuses permettront à ces populations durement touchées par la pauvreté, d’entretenir les sites restaurés et d’investir dans d’autres aménagements communautaires dont des points d’eau. Actuellement, les projets carbone concernent six villages et couvrent environ 900 hectares. A l’avenir, les ONG pourront élargir l’action à l’ensemble des 8.500 ha de terres restaurées, touchant ainsi 80 villages.

La réussite de cette opération dans les années qui suivent, dépendra d’une part d’une bonne gestion des arbres par les populations pour permettre une séquestration de CO2 conforme aux prévisions et d’autre part d’une gestion rationnelle de la part des ONG du processus Plan Vivo. La maîtrise du processus par ces ONG est cependant encore relativement faible. 

Le projet BKF017 a apporté une participation intéressante à la lutte contre la désertification, l’adaptation aux changements climatiques et à la biodiversité. La participation à l’atténuation aux changements climatiques et à la lutte contre la pauvreté pourra devenir effective à l’avenir grâce à une gestion durable des sites restaurés et une gestion rigoureuse des projets carbone.

Dans le cadre du PIC III, qui a retenu la gestion des ressources naturelles comme secteur prioritaire, il est souhaité de maintenir un accompagnement des autorités territoriales et des populations pour une application des chartes foncières d’une part et d’autre part des ONG pour une bonne maîtrise du processus Plan Vivo.

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